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E N
15.2   Les blocs erratiques
CART
Dans la plaine suisse, et sur la partie sud-est du Jura jusqu'à une altitude de
quelque 1 000 m, on trouve, reposant sur un substratum de molasse tertiaire ou
de terrains jurassiques ou crétacés surtout calcaires, des blocs rocheux dont la
taille peut atteindre plusieurs mètres. La nature pétrographique de ces blocs,
souvent granitique ou métamorphique, montre qu'ils ont une origine lointaine
car, dans cette région, ce n'est que dans les Alpes que ce type de roches affleure.
Cette constatation, faite depuis longtemps a conduit à imaginer divers mécanis-
mes pour expliquer le transport de ce que l'on a appelé des blocs erratiques.
La plupart faisaient appel à de puissants courants d'eau. Pour Horace-Bénedict
de Saussure (1779), grand explorateur des régions alpines, ces courants auraient
été provoqués par l'ouverture de cavités dans lesquelles se seraient précipitées
les eaux de l'océan qui, selon lui, couvrait alors ces régions, les eaux s'étant
ensuite écoulées par l'échancrure du défilé de l'Écluse, au SW de Genève, par où
le Rhône passe aujourd'hui. Pour Leopold von Buch, (1811, 1818), il se serait
agi de plusieurs courants ayant dévalé les régions alpines. Pour Escher de la
Linth (1819), ces courants auraient résulté de la vidange subite de lacs. Pour
Elie de Beaumont (1830), ils auraient eu comme origine une brusque fonte
des neiges due à un réchauffement corrélatif du soulèvement des montagnes
alpines.
Le fait que ces blocs erratiques présentent des formes anguleuses, et non arron-
dies comme cela aurait dû être en cas de transport aquatique, a incité certains
auteurs, parmi lesquels Bernhard Friedrich Kuhn (1787), Charles Lyell (1830) et
Charles Darwin (1838) à proposer qu'ils aient été transportés par des glaces flot-
tantes, icebergs et banquise.
D'autres explications avaient été aussi avancées, comme celle d'un simple glisse-
ment de ces blocs sur les pentes alpines, ou celle développée par Jean André de
Luc (1778) qui les voyait projetés au loin par des sortes d'explosions souterrai-
nes engendrées par de gigantesques effondrements.
Si James Hutton (1795), John Playfair (1815) et Jens Esmark (1829), avaient fait
état succinctement du rôle des glaciers dans la mise en place de ces blocs, ce
sont les recherches d'Ignace Venetz (1821, 1833), de Jean de Charpentier (1834,
1840) et, surtout, la généralisation du rôle et de l'étendue de ces glaciers par
Louis Agassiz (1837, 1840) qui ont fait abandonner toutes ces hypothèses, non
sans résistance.
À noter qu'Agassiz, suivant en cela les idées de Cuvier, auxquelles il restera
toujours fidèle, croyait à une glaciation subite ayant « anéanti toute vie organi-
que à la surface de la terre », glaciation qu'il pensait antérieure au soulèvement
des massifs alpins.
On a ensuite réalisé, par l'étude des moraines et des terrasses fluviatiles, qu'il n'y
avait pas une, mais plusieurs périodes glaciaires successives ; cela résulte des
travaux des frères Archibald Geickie (1835-1924) et James Geickie (1839-1914),
pour l'Écosse, publiés notamment en 1863 et 1877, de Thomas C. Chamberlin
(1843-1928), pour l'Amérique du Nord, et de Albrecht Penck (1858-1945) et
Eduard Brückner (1862-1927), pour les Alpes, dont l'ouvrage en 3 volumes « Die
Alpen im Eiszeitalter », paru en 1901 et en 1909, a fixé une chronologie encore
 
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